Alice Botté vit aujourd’hui un conte de fées. À moins qu’il n’ait fini par s’échapper de ce récit merveilleux où il jouait depuis trop longtemps les seconds couteaux ? Le guitariste du tout-paysage français indépendant, qui dévore encore les scènes comme un ogre, a publié un premier album dont le titre, “.1”, appelle déjà la série.
L’artiste s’y raconte, s’aventure avec des créatures pas seulement imaginaires et rature sa propre légende dont on pourrait pourtant faire un livre, met en lumière, aussi, sur une musique sombre, bruitiste et minimaliste, une intimité que l’on ne lui connaissait pas. Mais contrairement au lapin blanc pris dans les feux des projecteurs, Alice Botté s’expose là – à découvert, dans ses titres – et s’observe ici – à découvrir, dans cet article – sans peur aucune. Et brûle d’être reconnu pour celui qu’il est vraiment.
Romain Turzi contrôle décidément la boucle, qui compose son identité de musicien : quand elle fait corps avec le rythme hypnotique, les notes répétitives du krautrock de TURZI, ou quand elle arbore des instruments synthétiques pour d’autres nappes et tempos ad hoc dans TURZI ÉLECTRONIQUE EXPÉRIENCE. Infini paradoxe pour un artiste qui abhorre la répétition dans sa démarche créative : “La reproduction m’ennuie. Je lui préfère l’expérimentation.”
Romain Turzi s’applique depuis longtemps à ne maîtriser que le présent d’une prestation et n’aime pas l’anticipation dans ses projets. Pourtant, dans le déroulement de son entretien avec Discotexte, il s’est laissé happer par une autre boucle, presque temporelle, plus personnelle : en dévoilant vouloir clore (encore) un cycle TURZI, Romain a pris conscience que la musique pouvait “être à nouveau tout ce qu’elle représentait avant”, comme à ses débuts.
Et si, finalement : “Tout recommence, ou presque, rue Biot”…
Fin géomètre, Jonathan Fitoussi arpente de ses dix doigts différentes formes de claviers et boutons d’un autre temps. Féru “machiniste”, il expérimente aussi, étudie et délimite même toutes les possibilités soniques de synthés considérés intouchables parce que versatiles.
Depuis son premier album solo et bientôt une décennie, l’artiste est la fière touche d’une image encore abstraite de la musique électronique. À intervalles réguliers, donc, Jonathan Fitoussi fait le tableau, donne la mesure de ce courant minimaliste aux contours toujours fragiles auquel il se rapporte.
Force est de constater, pourtant, que la cadence s’accélère et les espaces (de travail) s’annexent, que l’inspiration s’expose, quand son œuvre s’embellit aujourd’hui d’un live (“Diagonals”), d’une bande originale de film (“L’Ordre des médecins”), et d’un disque en duo auquel il vient de mettre la dernière main (“Mirages”, à paraître, avec JB Dunckel). Trois nouvelles pièces maîtresses qui prennent une tout autre dimension grâce à l’étendue des connaissances et confidences de leur compositeur…
Œuvrant ensemble sans repos, les quatre membres de N U I T entendent prouver que la fortune ne vient pas en dormant. Car leur bonne étoile a, comme la lumière, la propriété de se réfléchir : c’est le son. Celui d’une electro saisissante car sensuelle, puissante voire pulsionnelle, dont ils sont à la fois les gardiens et les éclaireurs.
Loin d’être dans le noir, donc, le groupe semble avoir tout compris de la musique et va même au-delà : depuis ses débuts, N U I T lui compose une image – design, vidéos, scénographie – simultanément singulière et spectaculaire, et fait déjà le dessein d’un futur album conceptuel comme on observe des promesses qui méritent de voir le jour.
À l’instar, d’ailleurs, du dernier EP, “Hurry” (Spinnup, 2019), à écouter d’urgence tant il est brillant.
Après la collection de “Mange-disque”, le génie bricoleur Daquin a dispersé son groupe, remis le doigt dans l’engrenage de la composition et la main sur un nouvel accompagnant musicien. Travaillant sans relâche tout un âge de raison à sa machinerie consciente, ALB, Clément a sorti “Come Out ! It’s Beautiful”, un disque solaire dont il nous révèle l’orfèvrerie et l’ascension.
Avant de s’éclipser sous les projecteurs jusqu’au bout de la nuit.
“We are from all over the place.” Les origines comme les influences de Natas Loves You sont éclectiques, cosmopolites. À l’image d’un Ulysse des temps modernes en quête de chaleur humaine dans notre monde désenchanté – possible héros de leur premier album, “The 8th Continent” –, la power pop du quintet fait l’amour au voyage initiatique et la guerre à l’étroit d’esprit. Pour en découdre avec les lieux communs et enfin composer son odyssée dans notre paysage musical.